De la même façon alors que l'on peut avoir quelques doutes sur l'objectivité de votre parole, Mme Merteuil. Ils ont étudié le terrain d'une autre façon que vous, en s'intéressant aux discours et aux motivations des clients; leurs conclusions n'iront peut-être pas dans votre sens, mais qui est le plus objectif entre vous -s'il y en a un?
je ne prétends pas être objective, puisqu'en effet je défends une cause, et que c'est à ce titre que j'ai été invitée à présenter ici mes positions; je trouvais juste utile de préciser que le livre que vous présentez comme "des analyses fondées sur une étude du terrain" est lui-même co-rédigé par une personne qui elle-même défend une cause
Si j'ai bien compris, les abolitionnistes reprochent avant tout à cette industrie la déresponsabilisation des consommateurs, et voudraient entre autres que ces derniers soient pénalisés. Vous rejetez en bloc les abolitionnistes; est-ce que cela ne revient pas notamment à défendre les clients?
si je m'oppose à la pénalisation des clients, ce n'est pas pour les défendre, car je sais très bien que dans les faits, si ils veulent des putes, ils les trouveront. Je m'oppose à cette idée car c'est aux travailleurses du sexe qu'elle va nuire en premier lieu. Car pour que les clients nous trouvent, nous allons devoir exercer de manière encore plus cachée; et toute marginalisation signifie pour nous risques de sécurité et précarisation (notamment car plus difficile d'être en contact direct avec des clients, donc recours à des intermédiaires qui nous feront payer leurs services). Et toute précarisation s'oppose à notre empowerment, nous met en position de faiblesse, alors que nous devrions être en position de force, afin de pouvoir poser NOS conditions.