J/B a écrit :Dans le débat, il y a rarement un juste milieu entre le fanatisme des uns qui veulent exproprier et accessoirement décapiter les bourgeois et l'aveuglement des autres qui considèrent les revendications comme une atteinte à "leurs" libertés (de posséder, de s'enrichir, de travailler...)
En fait, je doute même qu'il y ait une position médiane viable.
Si, il est un positionnement intermédiaire viable. Il consiste en le fait de
faire évoluer les caractéristiques de la propriété, notamment celle des moyens de production (l'origine des revenus et des différences de revenus se situant en effet au niveau de la sphère productive). La faire évoluer de telle manière à lui conférer peu à peu une dimension plus collective (qu'elle devienne tout simplement à l'image de la production, qui, rappelons-le est le fruit d'un travail collectif généralement), une dimension plus sociétale, mais aussi plus écologique, en mettant l'accent sur l'usage (plutôt que sur la nue-propriété) et le ré-usage...
En réalité, il y a non pas un, mais une multitude de positionnements intermédiaires, loin de l'acceptation vide d'esprit critique de l'état de choses existant ou de son rejet radical. Autant de positionnements qu'il peut y avoir de degrés dans la volonté de faire évoluer la propriété (et la répartition des revenus qui en découle en grande partie).
Et il n'est nul besoin d'être utopiste (ou considéré comme tel) pour le(s) concevoir.
En effet, l'histoire mondiale de la propriété est avant tout l'histoire des propriétés,
i.e. des manières de les concevoir et de les encadrer, par la société (ou communauté) elle-même (droit coutumier) mais aussi par le pouvoir politique (cf. les limites légales au droit de propriété privée, qui sont nombreuses et qu'on oublie trop souvent pour parler de la propriété comme s'il s'agissait d'un droit absolu, et universel !). La propriété est un ensemble de droits relatifs !
Qu'il y a-t-il de commun, par exemple, entre la propriété des champs au Moyen-Age, avant le mouvement des
enclosures, et la propriété foncière au XVIIIème siècle, puis actuelle en Europe ? Qu'y a-t-il de commun entre la propriété de type romain et le droit africain de la terre ?
Ne pouvons-nous pas apprendre de notre passé ? apprendre d'autrui aussi ? nous plonger dans la diversité des conceptions de la propriété pour penser celle dont nous avons peut-être besoin aujourd'hui ? Ou sommes-nous condamnés à l'ethnocentrisme, ainsi qu'à la fausse perception que le présent est le passé et le futur (ce qui est a toujours été et sera toujours) ?
N'y a-t-il pas culturellement de la place pour la poursuite d'une évolution de
s droit
s de propriété ?
Ainsi, dans les voies intermédiaires, il ne s'agit pas de supprimer la propriété.
Il s'agit seulement de continuer le processus d'évolution et d'adaptation. De faire évoluer les caractéristiques de la propriété, pour la rendre compatible avec la société telle que nous voudrions qu'elle devienne : une société moins inégalitaire, plus reconnaissante de la nature profondément collective des productions (matérielles comme immatérielles), plus relationnelle. En quelques mots : une société, et donc une économie, plus respectueuse des êtres humains (de tous les êtres humains ; cf. la proposition de revenu universel de base)... et de notre environnement.
Pour cela, le
statu quo en matière de réflexion sur la propriété et la répartition des revenus n'est guère envisageable.