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À propos du droit d'auteur ?

Culture, numérique, Internet, Recherche et Technologies
*Alice*
Moussaillon
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À propos du droit d'auteur ?

Messagepar *Alice* » ven. 02 déc. 2016, 11:22

Hello,
j'aimerais comprendre quelles alternatives au droit d'auteur classique sont proposées pour s'assurer de la possibilité des créateurs de vivre de leur travail. C'est un peu le point concret où achoppent toutes mes beaux principes, mais je suis sûre que d'autres auront trouvé des propositions.
D'avance merci,
Alice

Pasmafaute
Pirate
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Re: À propos du droit d'auteur ?

Messagepar Pasmafaute » dim. 04 déc. 2016, 15:23

C'est une question compliquée, je vais essayer de donner quelques éléments de réponse (c'est purement à titre personnel de la part d'un sympathisant du PPfr, ce n'est pas forcément la ligne du parti).

Tout d'abord, il faut bien noter que le coût d'un produit tendra vers son coût de production marginal. Or, le coût de reproduction d'un fichier numérique est virtuellement égal à zéro, donc tout ce qui peut être numérisé verra son prix tendre vers le gratuit. Sans oublier qu'un fichier numérique est un bien non rival (ce n'est pas parce que j'ai copié le tiens que tu ne l'as plus). On se place du coup dans une économie dite d'abondance, compter sur la rareté d'un produit pour augmenter son prix ou espérer le vendre à l'unité n'a plus aucun sens. Essayer de recréer les conditions d'une rareté artificielle sera voué à l'échec (et c'est pourtant bien ce qu'essaye de faire la HADOPI, tant pis pour elle).

Maintenant, comment gagner de l'argent dans une économie de l'abondance ? Là, je crois qu'il faut bien noter une chose, c'est que ce n'est pas à nous d'inventer le modèle économique à la place des auteurs, c'est à eux de le trouver. Ceci dit, le passé nous renseigne quand même : au début des supports enregistrés, les musiciens qui gagnaient leur vie essentiellement grâce aux concerts étaient terrifiés ; ils pensaient qu'ils n'allaient plus pouvoir gagner leur vie. Maintenant, c'est le contraire : comment gagner sa vie si on ne peut plus vendre de supports physiques ? Peut-être en misant sur ce qui ne peut pas être numérisé : le lien avec l'auteur, la participation à l'élaboration de l’œuvre, les performances live (comme avant). En tout cas, la rémunération des musiciens norvégiens augmente comme l'expliquait Rick Falkvinge. Des intermédiaires devenus inutiles vont inévitablement disparaître, mais la création, elle, ne s'est jamais aussi bien portée qu'aujourd'hui.

Quant aux logiciels, la question est réglée depuis longtemps : il suffit d'examiner tout ce qui tourne autour du logiciel libre qui a une économie florissante. Je n'ai pas payé un kopeck pour mon excellent système Fedora (même si j'ai un peu contribué en retour avec des rapports de bugs et des traductions). Red Hat, pourtant, est largement bénéficiaire depuis longtemps. Parce qu'ils vendent des services autour de RHEL (distro d'entreprise pour laquelle Fedora est une base). Et puis, il y a aussi le secteur non marchand : les contributions académiques et individuelles ainsi que celles basées sur l'économie du don sont non négligeables. Et je ne parle même pas d'Android qui a écrabouillé le modèle économique de Microsoft qui a cru que son modèle était la vente de licences, même s'il y a beaucoup à dire sur les données personnelles (mais c'est loin d'être limité à Android, Windows 10 faisant largement pire).

Enfin, je crois qu'il faut bien réaliser qu'on ne peut plus vendre des films, des morceaux ou des logiciels à l'unité : Apple Music, Google Play Music ou Spotify ne vendent *pas* de la musique, tout comme un cinéma ne vend pas des films, ou tout comme Microsoft ne vend pas des licences de logiciels. Je m'explique : pour Spotify au hasard, ce qui vendu, c'est la facilité de découverte de nouveaux morceaux, la complétude du catalogue, les services associés (ubiquité et facilité d'accès, avertissement des concerts dans le coin etc.). La musique, elle, n'est que le produit d'appel et c'est pour ça que la rémunération des artistes est si faible, même si leurs revenus augmentent comme mentionné ci-dessus. Pour les cinémas, c'est le plaisir de sortie entre amis qui joue.
Quant à Micromou, elle a prospéré dans l'ère précédent Internet et a surtout vendu de la compatibilité (votre voiture ne fonctionne que sur ma route à moi). Désormais, avec le développement cross-platform et (malheureusement) avec le cloud, la rareté de cette compatibilité tend lentement à disparaître. FreeDOS 1.2 sort bientôt :) , LibreOffice remplace Office pour la plupart des besoins et s'améliore à chaque version, il vaut nettement mieux développer avec Qt ou GTK que pour MFC et j'en passe. Je l'avais dit plus haut, le modèle qui avait si bien réussi à Microsoft avant Internet s'est littéralement cassé la gueule face à Android, sur les serveurs, les mainframe, le cloud et les supercalculateurs c'est réglé depuis longtemps, et sur le bureau, c'est une question de quand, pas de si.

TL;DR: Miser sur ce qui ne peut être numérisé, que ce soit le lien avec l'auteur, la co-élaboration des œuvres (dons, participation directe etc.), les performances live, la facilité d'accès ou les services. Ça marche, aujourd'hui même, et ça n'ira qu'en se développant (coucou l'impression 3D). Alors franchement, un droit d'auteur couvrant la vie de l'auteur plus 70 ans, c'est du grand nawak. Un domaine public florissant est vital pour la création, alors je crois qu'il faudrait réduire le délai à 5 ou 10 ans maximum (non parce que les descendants de Tolkien qui n'en branlent pas une et se contentent de gérer la collecte des fonds, il faut m'expliquer en quoi c'est utile à la création).

Voili voilou.
Delenda est Hadopi

madjungleman
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Re: À propos du droit d'auteur ?

Messagepar madjungleman » mar. 06 déc. 2016, 17:38

Merci pour la question et la réponse super claire : économie de l'abondance est un concept que je trouve très utile par les temps qui courent, même si j'aime à le combattre.
Pour illustrer le tout, je rajouterais l'exemple assez récent maintenant des liseuses : pratiques, confort optimal, intéressant pour le stockage de livres qu'on ne relira pas (sinon j'aime le papier) etc.
Sauf que le prêt entre utilisateurs est une vraie galère et que les DRM pourrissent tout. Quant au prêt sur internet, nada ! alors qu'il existe des solutions pour la musique (deezer et ses copains), les films, les séries, même les BD (iznéo).
Ici encore les éditeurs essaient d'avoir la même utilisation d'un bien alors qu'il est dématérialisé.
(les éditeurs de manuels scolaires numérique en sont un bon exemple).

*Alice*
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Re: À propos du droit d'auteur ?

Messagepar *Alice* » mer. 07 déc. 2016, 00:07

Merci pour cette longue et riche réponse ! Les comparaisons avec les autres secteurs sont particulièrement intéressantes, la musique, mais aussi les logiciels, tu as raison. Et je suis d'accord avec l'absurdité des contrats que nous signons et qui nous lient jusqu'à notre mort et 70 ans après. C'est un monopole absolu que nous accordons à un éditeur, et un monopole à sens unique puisqu'il peut, lui, décider de ne plus publier notre livre, voire de l'envoyer au pillon. J'ai signé quelque fois avec des maisons italiennes et leurs contrats durent 10 ans, ce qui met l'auteur en position de force puisqu'il peut renégocier ou reprendre son texte.

Qu'il faut que les auteurs trouvent leur propre forme, je suis bien d'accord mais c'est un discours difficilement audible pour la plupart de mes collègues. Un grand nombre sont dans des situations vraiment précaires et s'accrochent au peu que le système actuel leur assure. C'est par ailleurs un milieu moins innovateur que ne l'est le monde informatique par exemple. Mais on est super fort en adaptation, parce qu'il le faut bien.

Je pense qu'ils ont surtout besoin de pistes, d'horizon, pour envisager autre chose. C'est ce que je cherche en ce moment :)

Pourriez-vous me dire, par exemple, comme Spotify rémunère ses artistes ? Ou même : comment fleurit, justement, l'économie du logiciel libre ? Désolée si ma question semble naïve. C'est juste pour dégager des mécanismes.

Notre métier (en jeunesse) est déjà pas mal tourné vers les rencontres scolaires (c'est perso 50% de mes revenus, les autres 50% étant des droits d'auteur purs), mais c'est biaisé car il s'agit de l'argent public, c'est une sorte de subvention cachée. Certains aussi font des ateliers d'écriture ou d'illustration (un gros business en Italie, en France cela se fait moins). Il y a bien sûr les lectures publiques, les spectacles. Mais tout cela tout le monde le fait déjà un peu, c'est une partie minuscule de nos revenus.

Bref, ce serait bien qu'on croise nos expériences pour essayer de proposer des mesures concrètes...

Merci merci :)

Pasmafaute
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Re: À propos du droit d'auteur ?

Messagepar Pasmafaute » jeu. 08 déc. 2016, 19:25

Pour la rémunération de Spotify, je n'ai pas les détails mais c'est au lance-pierres. Ceci dit, il faut noter quelque chose d'important dans le milieu de la musique : là où les services d'un studio et plus important encore, d'un label pour la production et promotion étaient indispensables il y a quelques années encore, aujourd'hui on peut faire beaucoup de choses avec un PC tout bête, de l'ingénierie à la production en passant par la publication. Je ne dis pas qu'un bon ingé du son est devenu inutile, loin de là, mais pour ceux qui n'y avaient de toute façon pas accès, les choses se sont nettement améliorées. J'ai encore sous la main la démo qui remonte à la fin des années 80 d'un groupe de métal qui connaît le succès aujourd'hui, eh bien bordel, il fallait avoir l'oreille pour déceler leur talent tant le son était pourri. Rien à voir comparé à ce qu'un groupe semi-pro peut publier au hasard sur Jamendo aujourd'hui.

Bref, il revient nettement moins cher de publier sa musique aujourd'hui, donc il l y a bien plus d'auteurs qui peuvent publier leurs œuvres, du coup la concurrence est plus rude. Donc, comment on fait ? Est-ce qu'on laisse l'économie du marché décider de tout, ou est-ce qu'on introduit quelque chose par dessus pour équilibrer le schmilblick ? Des solutions ont été proposées, comme le mécénat global qui est, selon moi, la version la plus aboutie de la licence globale. On légalise le partage qu'on n'arrêtera de toute façon pas, on introduit une contribution obligatoire de 5 euros grosso modo, et l'internaute décide en grande partie à qui vont les fonds. On lisse aussi la redistribution pour que celui qui vend 100 fois plus touche mettons 10 fois plus, pas 100, le « reste » allant à encourager la diversité. Devine qui s'y est opposé bec et ongles ? Et nous, les pirates, on n'a pas réussi à expliquer que sans une telle mesure, les auteurs allaient finir dans le giron d'une licence globale privée, donc de nouveaux seigneurs qui auraient droit de haute et basse justice sur leurs serveurs, genre Spotify ou Netflix.

Stallman, le créateur des logiciels libres, qui était derrière le mécénat global (il a oublié d'être con, lui) explique comment il voir les choses. C'est aussi la position de la Quadrature du Net (je ne peux pas mettre de lien, je suis limité à deux). Maintenant, sans mécénat global, je crois qu'une des manières de gagner de l'argent et de profiter d'Internet au lieu de lutter contre. À savoir distribuer sa musique sous une licence libre (ou à tout le moins un licence qui autorise la redistribution non commerciale, genre Creative Commons By-NC-SA, ce qui revient à dire je n'ai pas encore trouvé de modèle économique, mais je cogite). Ça fait de la pub, ça aide à se faire connaître, et il sera toujours possible de vendre du premium aux fans par la suite, des les tenir au parfum des concerts à venir, de leur faire manger du merchandising etc. C'est sûr, cela nécessite d'être plus qu'un musicien, il faut penser à assurer sa promo, et maintenir le contact avec le public, mais c'est ainsi.

Passons au logiciels : c'est là que tout à commencé, donc c'est là qu'on a les solutions les plus abouties. Stallman, mentionné plus haut, à lancé le projet du système d'exploitation GNU (que tout le monde ou presque appelle par erreur Linux) en 1984. Les modèles économiques sont multiples, mais reviennent tous ou presque à donner le produit de base gratuitement, et de proposer quelque chose de payant par la suite. Que ce soit du développement spécifique à des besoins (c'est ce qu'a fait Stallman avec l'éditeur de texte emacs au tout début), des capacités supplémentaires (c'était le modèle de LimeWire), des services, du support, de la formation, ou tout bêtement une garantie (quand ça merde, il y aura quelqu'un à engueuler), le tout pouvant être vendu sous forme d'abonnement. Les SSLL prospèrent là-dessus, Red Hat en fait son beurre et Canonical qui édite Ubuntu vise clairement la même chose. Pour les « petits projets », les dons peuvent parfois suffire (Ubuntu MATE et Linux Mint publient tous les mois ce qu'il reçoivent en dons, et ça se compte en milliers d'euros). Si on passe du côté obscur de la force il y a l'exploitation des données personnelles et la pub. C'est le modèle d'Android, mais des logiciels propriétaires font la même chose en pire parfois. Et c'est pour ça que je n'utilise pas Spotify, Netflix et autres.

Je tiens à souligner un élément spécifique aux logiciels libres : il n'est pas seulement question de modèle économique mais aussi de liberté. En ayant le code source du logiciel, on n'est plus soumis aux desiderata de l'éditeur. Au pire, on peut soi-même ou en employant des gens, adapter le logiciel à ses besoins plutôt que de subir la politique commerciale de l'éditeur (suivez mon regard, Microsoft par exemple). Il est question de souveraineté pour un pays, d'autonomie pour une entreprise, de liberté pour l'utilisateur final. Au hasard, il n'y a pas grand-chose à faire contre la collecte de données de Micromou sous Windows. Si Fedora se mettait à faire pareil, je migrerais vers une autre distribution et retrouverais mon environnement préféré, ce qui fait que Red Hat a un intérêt bien compris à ne pas déconner (Canonical a un peu déconné, ils ont été obligé de faire marche arrière).

Pour en venir enfin à ta branche (que je ne connais pas du tout), ça sera surtout à toi de m'aider :) Je vais juste indiquer In Libro Veritas comme éditeur qui soutient les licences libres et Sésamath pour les manuels scolaires. Tu me diras ce que tu en penses ? Un manuel libre aurait l'avantage de pouvoir être amélioré par des auteurs successifs, ce qui pourrait en faire un ouvrage collaboratif à la façon Wikipédia ou plus prosaïquement, genre Flossmanuals.
Delenda est Hadopi

*Alice*
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Re: À propos du droit d'auteur ?

Messagepar *Alice* » ven. 09 déc. 2016, 10:23

Merci pour toutes ces informations !! C'est très intéressant, vraiment. Concernant mon domaine, je suis en train de me renseigner. Je suis à la Charte, qui fait partie du CPE (Conseil Permanent des Ecrivains) qui traitait avec Julia Reda. Je pense qu'il y a eu beaucoup d'incompréhensions, et le sentiment qu'on leur disait vous vous démerderez avec Ulule.

En creusant aussi, je me rends compte que la mise en place de la propriété intellectuelle est un drôle de bordel juridico-historique... Connais-tu l'affaire Zai/Grasset ? Si tu as le temps, jette un oeil sur l'historique pages 14-16.

https://drive.google.com/file/d/0B5z1-N ... TSnMw/view

Sinon, je ne suis pas vraiment convaincue par l'idée de droit fixe autour, mais j'aime bien l'idée de remplacer la notion de propriété intellectuelle par celle de travail intellectuel. De toute façon c'est une propriété que nous ne possédons jamais puisque nous la cédons dès que nous signons un contrat !

Je vais aller voir de plus près le concept de Mécénat global... Est-ce encore d'actualité ?

Il faut que je lise ça aussi... Tu connais ? http://grit-transversales.org/IMG/pdf/C ... -NC-ND.pdf

Les éditions de manuels, je ne connais pas du tout... Je soupçonne un sacré business, mais juste en tant que maman qui voit défiler les kilos de livres inutiles !

madjungleman
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Re: À propos du droit d'auteur ?

Messagepar madjungleman » ven. 09 déc. 2016, 11:15

Super intéressant tout ça.
Le texte de l'avocat a l'air instructif. Je vais me mettre dans le roman... avec ma liseuse !
Concernant les manuels, le ministère vote à son budget le montant du budget opérationnel prévisionnel : 150 million en 2016 pour 11 million de manuels scolaires à cause des nouveaux programmes alors que certains ne changent que peu.
Les éditeurs ont neuf mois (en général c'est un an) pour sortir ces manuels, c'est à dire qu'ils sont fabriqués par des enseignants qui ont à peine eu le temps de lire ces nouveaux programmes, ne les ont pas expérimentés et n'ont aucun recul sur de nouvelles modalités de cours (surtout cette année en collège avec les co-enseignement, les enseignements pratiques, etc.) Donc sont produits des manuels à la va vite.
Et les établissements ne peuvent utiliser cet argent pour autre chose : ce sont des crédits fléchés.
De très gros lobby œuvrent là derrière. Si j'étais conspirationniste, je dirai que la gauche a refondu les programmes de 4 ans d'enseignement en une seule année de mise en pratique (ce qui ne s'était jamais fait) pour satisfaire des éditeurs avant la fin du quinquennat.

*Alice*
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Re: À propos du droit d'auteur ?

Messagepar *Alice* » ven. 09 déc. 2016, 12:48

Et je serais curieuse de savoir combien les profs sont payés pour ce (gros gros) boulot ? ça sent la rémunération au prestige... non ?

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Neverwhere
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Re: À propos du droit d'auteur ?

Messagepar Neverwhere » lun. 12 déc. 2016, 13:09

En général, c'est payé au forfait, pas bien cher.

Pour revenir sur le droit d'auteur dans le rayon livre : je suis d'accord avec Alice sur la propriété intellectuelle, je préférerais travail intellectuel !

Je suis particulièrement touchée en ce moment par la question de la propriété, avec un éditeur qui ne veut pas me redonner mes droits, malgré une exploitation très réduite (mais bien réelle, d'où l'impossibilité de casser le contrat) : J'ai l'impression qu'on m'a pris quelque chose de très précieux. Je ne peux même pas le réécrire sans m'auto-plagier ! Pour autant, sans l'éditeur, le livre n'aurait pas existé, c'est très compliqué, et très dur d'en sortir.

Et c'est dur aussi de s'en sortir. financièrement J'aimerais pouvoir écrire à temps plein, sans pour autant être obligée de faire des bouquins à tire-larigot afin de remplir le porte-monnaie, ou de me balader partout en France pour faire de l'animation auprès des scolaires. Mais force est de constater que c'est impossible, si ce n'est une année ou deux si on obtient une bourse de l'état (par le biais du Centre national du livre). Du coup, j'écris moins et moins bien. Peut-être que ce n'est pas plus mal d'écrire moins car certains disent qu'il y a une surenchère de publication, trop de livres pour que chacun en tire de quoi subsister. Mais peut-être que ce n'est qu'un point de vue de marchand, car le public est heureux, lui d'avoir autant de choix !

Autre question : écrire mieux, en ayant le temps de le faire grâce à un salaire, ce serait quand même bon pour la création ! Or seuls 33% des auteurs-illustrateurs en ont fait leur activité principale. Et encore, certains ne font que survivre car le seuil d'affiliation pour être reconnu comme auteur à temps complet est à 730 euros mensuels. Et ce n'est pas facile à atteindre, ça fait quand même entre 10 et 20 000 livres vendus par an selon que vous êtes auteur vieillesse, auteur jeunesse d'album, auteur jeunesse de roman, illustrateur etc.

On peut écrire si on vend bien. On ne vend bien que si on a un gros éditeur, donc si on est déjà intéressant financièrement parce qu'on a déjà beaucoup vendu avant. Ou si on produit énormément. Donc si on ne fait que ça. Et en continu, parce qu'on n'a pas de compensation les années où ça marche moins bien (on ne peut même pas le prévoir puisqu'on a les droits des mois après).
Les jeunes auteurs ne peuvent pas en vivre avant des années. Et les vieux ne peuvent pas avoir de panne, ou privilégier un projet chronophage sans risquer de mettre la clé sous la porte.
L'argent, et surtout son absence, empêche de créer sereinement. Parfois même empêche de créer.

Mais alors comment choisir ceux qui seraient financés, ceux qui pourraient en vivre si ce n'est pas par le nombre de ventes ? Qui choisira ? Les éditeurs ? L'état ? Comment les nouveaux créateurs talentueux s'imposeront-ils ? Comment distinguer la valeur d'un livre qui se vend beaucoup parce qu'il est bon de celle d'un livre qui se vend beaucoup parce qu'il a été adapté au cinéma alors que c'est mal écrit ou dangereux d'un point de vue éthique ? Comment affirmer : cet auteur ne mérite pas qu'on lui donne un salaire car il ne vend pas assez ? Ou parce qu'on ne juge pas ses choix respectables ? Ou parce qu'il n'est pas politiquement correct ?
C'est un casse-tête.

Certains auteurs optent en effet pour de nouveaux systèmes, comme Maliki, avec Ulule :https://fr.ulule.com/maliki-blog/ Mais cela me semble préjudiciable à la création pour de multiples raisons : se posent des questions de qualité, de pérennité, (voire d'arnaque des auteurs s'ils sont coachés par de faux éditeurs).

Bref, ça va être dur de bouger à moins de repenser les choses complètement et de redessiner toute l'industrie du livre. Et ça pèse 4 milliards par an (13% pour le scolaire), soit la moitié du marché des biens culturels. Donc les lobbys doivent être en effet très puissants. Et la voix des auteurs trop fluette, surtout quand ils ne sont enfoncés sous l'eau par leur ministre qui reconnaît qu'ils sont sous-payés mais dit ne rien pouvoir faire pour eux !

*Alice*
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Re: À propos du droit d'auteur ?

Messagepar *Alice* » lun. 12 déc. 2016, 13:38

C'est légal le forfait ? Normalement c'est uniquement pour les œuvres collaboratives, avec un minimum de 7 co-auteurs, je crois.

L'avantage du travail intellectuel (plutôt que propriété), c'est qu'on pourrait le partager avec les éditeurs qui sont aussi des "travailleurs" (et là plutôt que M. Le Boss, je mettrais bien nos interlocuteurs qui mettent la main dans le cambouis ! Mais c'est peut être un autre sujet...), et bien le différencier du droit moral qui lui est inaliénable.

*Alice*
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Re: À propos du droit d'auteur ?

Messagepar *Alice* » lun. 12 déc. 2016, 13:39

La moitié du marché des biens culturels, vraiment ??! C'est dingue, je pensais pas...


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