Yop tout le monde !
Je voulais donner mon avis sur le communiqué du PP contre l'intervention en Syrie. Je n'ai pas participé au débat, hélas, ni au communiqué, et peut être est-ce un peu tard, mais au moins j'aurais dit ce que j'ai à dire
Quelques critiques :
1) La forme : J'aime la langue française, mais la syntaxe et le vocabulaire sont trop riches. Il est parfois difficile de réellement saisir le sens des phrases, et je pense que nous gagnerions à un langage moins riche mais plus pragmatique. Il y a même des lignes que j'ai dût relire à plusieurs reprises avant de les comprendre, et je trouve ça dommage. Je pense aussi qu'il serait bénéfique de développer un peu plus chaque point pour être plus percutant. Les gens ne sont pas forcément spécialistes de géopolitiques du Moyen-orient et peuvent rapidement se perdre.
Ce serait au final
un vrai gain de transparence que de rendre la lecture plus fluide.
2) Des éléments externes sont déjà en action.L'argument selon lequel la Syrie dispose d'un système ethnique et politique ancien fragile était valable il y a deux ans (et encore!), mais plus maintenant.
En effet, des éléments externes agissent déjà considérablement sur l'équilibre interne de la Syrie.
D'abord,
cet équilibre n'était pas spécialement faste : la minorité alaouite (dont fait partie Assad) gouverne une constellation de peuples, une majorité silencieuse, notamment des sunnites et des chiites. Certes, le clan Assad tenait jusqu'à présent cette diversité ethnique dans un bloc compact, évitant ainsi une dégringolade comme au Liban dans les années 1990 ; cependant ses méthodes étaient (et sont) celles d'une dictature.
Deuxièmement,
de nombreuses forces externes agissent en Syrie :
- Deux grandes puissances influencent directement le régime Syrien : la
Russie, qui dispose d'une base navale en Syrie, et la
Chine, qui y voit un marché potentiel.
-
L'Arabie Saoudite et le Qatar fournissent de armes aux rebelles, mais pas à n'importe lesquels. Il faut bien distinguer d'une part
les rebelles croyants modérés et laïcs (qui ont lancé les premières manifestations), et d'autre part
les rebelles fanatiques djihadistes. Ce sont ces derniers qui sont armés par les pays du Golfe et qui écrasent progressivement les révolutionnaires "modérés" par leur supériorité matérielle. Rappelons aussi que ces djihadistes viennent en partie de l'étranger et déstabilisent les rapports de force.
- Contrairement à ce que vous soulignez, Israël a tout intérêt à ce qu' El Assad s'effondre.
Le régime syrien était un grand soutien de la cause palestinienne, en témoignent les nombreux camps de réfugiés palestiniens en Syrie. Il n'est donc pas étonnant de voir des milices palestiniennes et des membres du hezbollah libanais intervenir aux côtés de Bachar El Assad. C'est pourquoi le conflit englobe aussi les tensions en Cisjordanie où la colonisation reprend de plus belle au détriment du droit international. La chute du régime est un coup dur pour l'Autorité Palestinienne, isolée diplomatiquement.
3) Les enjeux économiques ne délégitiment pas la lutte des rebellesJe trouve assez dur de déclarer que les rebelles perdent toute légitimité en raison des enjeux de l'eau et des intérêts turcs.
Ce n'est pas parce que la chute d'un régime a un intérêt pour un état voisin que la lutte des révolutionnaires perd de sa légitimité. La guerre d'indépendance américaine était-elle moins légitime car soutenue par la France ?
4) Le Parti Pirate est indépendant de la pensée globale.Ainsi, il me semble terrible de "considérer" l'amitié de la France avec des pays très contestables. Le cas d’
Israël tout d'abord, dont j'ai brièvement parlé précédemment, qui ne respecte pas les directives et les normes internationales, qui étouffe un peuple depuis des décennies, et dont l'extrême droite est actuellement au pouvoir. Quant à l'Arabie Saoudite, une des monarchies les plus dures et les plus critiquables du monde, je ne ferai pas de commentaire.
5) Vous avez dit "Munich" ?"Comment comparer l’invasion de vive force du territoire autrichien par une Allemagne totalement nazifiée à un acte de guerre, hautement condamnable s’il était prouvé, qui ne s’inscrit dans aucun projet génocidaire, ni violation territoriale"Les accords de Munich concernaient
l'annexion des Sudètes, en Tchécoslovaquie, et non l'Autriche ! De plus, si la formule de Kerry est maladroite, elle n'est pas à prendre au pied de la lettre. Il voulait simplement signifier -en utilisant l'Histoire- que les démocraties ne devront pas céderet agir, car parfois la guerre peut être nécessaire. Bien sûr, je ne soutiens en aucun cas sa vision des choses ; si à mes yeux la guerre aurait dût être déclarée à l'encontre du régime nazi en 1938, la Syrie est dans une situation totalement différente. Il n'y a pas menace sur le monde entier d'une guerre généralisée, ni de danger pour la Démocratie au sens large.
BREFVous l'aurez compris, je trouve ce communiqué mal tourné par moments. J'adhère à la majorité des points malgré tout. Je pense simplement que nous ne sommes pas des experts, et que s'attaquer à des sujets de géopolitique aussi complexes peut nous envoyer dans un mur, à moins de ne disposer de ressources suffisantes pour que notre argumentation soit infaillible. Néanmoins il est juste que chacun puisse donner son avis sur ce sujet épineux.
Pour conclure et donner mon avis, je suis partiellement d'accord avec la non-intervention. Je pense qu'une intervention militaire directe serait destructrice et totalement en dehors des réalités du terrain, mais je soutiens la thèse de Denis Sieffert (journaliste chez Politis) qui souligne
l'intérêt d'armer les rebelles "modérés", pour lutter contre le djihad et contre le régime syrien.
"Il serait bien plus utile d’équiper les courants laïques de la rébellion afin qu’ils se protègent contre l’aviation et les bombes de Bachar. Une solution politique est sans doute à ce prix. Tant qu’il y aura déséquilibre des forces, que les chars du régime occuperont les villes, il sera bien difficile d’envisager une négociation qui soit autre chose qu’un piège pour la rébellion.", l'édito de Politis par Denis Sieffert, 5 Septembre 2013.