dwt a écrit :il s'agit là d'une cybernétique à l'intérieur d'une cybernétique ; je le cite «Si une théorie du cerveau a quelque prétention à être complète, elle doit expliquer sa propre écriture. Plus fascinant encore, celui-là même qui écrit cette théorie doit rendre compte de son écriture. Transporté dans le domaine de la cybernétique : le cybernéticien, en entrant dans son propre domaine, doit rendre compte de sa propre activité ; la cybernétique devient la cybernétique de la cybernétique, ou cybernétique de second ordre.» (conférence sur l'éthique) C'est un petit peu gnangnan et c'est pour cela que j'ai intercalé une phrase qui mentionnait qu'en fait Foerster se plaignait de devoir parler de cette chose aussi simple qui devenait aussitôt d'une infinie complexité.
Je crois y voir de la réflexivité scientifique qui, généralisée, peut mener à une forme épistémologie. Mais honnêtement, je ne comprend pas plus l'apport de la cybernétique pour l'approche de la place des "minorités" dans la société. Je suggère que nous refermions cette discussion sur la cybernétique dans ce topic car cela me semble un peu hors sujet à un aussi haut niveau théorique.
dwt a écrit :Par ailleurs je vous remercie de m'avoir détaillé avec finesse le principe d'intersectionnalité. Je ne suis pas convaincu qu'il diffère de ce que je pense, mais je suis intrigué. Pouvez-vous développer ce que l'on nommerait de manière la plus réduite, un "rapport de domination entre genre et classe"
Je parlais d'une
articulation entre des rapports de domination fondés sur des registres différents (race, classe, genre). C'est à la fois une
perspective analytique comme
ici, où le fait de voir des hommes blancs sénateurs jeter des cacahuètes sur une femme noire journaliste ne relève pas que du racisme ordinaire mais aussi de la manifestation d'un sexisme. Mais cela a aussi été envisagé comme une
approche militante en considérant qu'il n'y ni opposition ni hiérarchisation à faire entre les différents rapports de domination et que, en gros, lutter pour les droits des femmes, des homos, des noirs, des pauvres, des migrants, des citoyens des pays du Sud, etc (en bref pour chacune des minorités symboliques opprimées) c'est lutter pour les droits de tous. On peut en trouver une illustration dans le mouvement altermondialiste qui va considérer que lutter pour les droits des travailleurs dans les pays du sud c'est aussi lutter pour le droit des travailleurs dans nos contrées. Car on réduit ainsi les flux migratoires, on évite le dumping social etc.
A l'opposé de l'intersectionnalité, on trouve une démarche dite "séparatiste". C'était le cas du marxisme traditionnel qui considérait que seulement une fois qu'on aurait régler la condition de la classe ouvrière, on s'intéresserait au rapport homme/femme. En attendant les femmes étaient priées de se taire et de faire les sandwichs lors de la préparation des manifs. De même, certains mouvements féministes dans les 70's refusaient la présence des hommes, ou niaient complètement qu'en leur sein se reproduisait les hiérarchies sociales avec les femmes issues des classes populaires à la tambouille et celles issues de milieux plus favorisés occupant les fonctions de représentation, de porte-parolat du mouvement. Ou encore, certains considèrent que les droits des LGBT peuvent attendre tant qu'on a pas amélioré la condition de la femme dans nos sociétés hétéros-normées. En général, c'est l'excuse du y'a pire ailleurs (géographiquement ou socialement).
dwt a écrit : mais comment posez-vous les termes (y a-t-il des équations écrites?).
J'ai l'impression de voir ici la manifestation de l'inquiétude sourde du physicien ou du mathématicien face à la complexité du monde social dont la formalisation ne peut avoir lieu qu'à travers le langage (certes infiniment plus glissant et incertain) et non via des polynômes du N-ième degrés. Et c'est ce que je perçois de la cybernétique et du fonctionnalisme en général.
Je ne pose les termes d'aucune équation pour appréhender le monde social. Cette perspective issues des sciences dures me semble complètement à coté de la plaque. Le monde social est composé à mon sens (et pour faire très simple) d'une succession d'interactions (entre individus et/ou entre individu et institution au sens sociologique) à travers lesquelles se manifeste la présence de faits sociaux (au sens durkheimien du terme). On peut par la suite en déduire des déterminismes, des lois générales, des rapports de domination, des structures etc... et se fabriquer un outillage conceptuel mais aucune formalisation mathématique.