Fiscalité : une remise à plat est nécessaire
Publié : lun. 04 nov. 2013, 14:02
Bonjour à tous,
nouveau venu sur le forum, je réfléchis depuis de nombreuses semaines à notre situation fiscale et les actualités des derniers jours précipitent l'idée de faire partager mes réflexions et mes conclusions personnelles.
Ce post souhaite venir en complément des sujets précédents, notamment sur les droits de succession : economie-emploi/reforme-sur-heritage-t11005.html
et sur la progressivité de l'impôt sur le revenu :
economie-emploi/progressivite-impot-sur-revenu-t8942.html
La réflexion sur la fiscalité me semble essentielle aujourd'hui au vu du contexte actuel :
- publication du "Capital au 21ème siècle" par Thomas Piketty -> http://www.liberation.fr/economie/2013/ ... picks=true pour une interview (parmi d'autres) de l'auteur
- débats houleux sur la fiscalité ("ras-le-bol" fiscal, écotaxe en Bretagne, hausses de la TVA)
- besoin de réflexion vers un système plus juste (Badinter sur France Inter dans Tous politiques)
- fraudes et évasions fiscales régulièrement évoquées dans les médias.
Le débat sur l'impôt est ancien et a fait l'objet de nombreuses mobilisations, révoltes, lois, mouvements au fil de l'histoire (lire Nicolas DELALANDE, Les batailles de l'impôt pour un récit historique riche et documenté sur la période 1789-2000). Le débat actuel n'est qu'un énième épisode d'une lutte séculaire.
Chaque année, la France a besoin de collecter environ 1000 milliards d'€ pour assurer le fonctionnement des services publics et la protection sociale, qui représentent un plus de 50% du PIB.
Régulièrement, certains acteurs du débat public évoquent le "ras-le-bol" fiscal des Français, notamment la classe moyenne, et appellent à payer soit moins d'impôts, soit moins de charges sociales pour préserver la compétitivité du pays.
Entre beaux discours et vrais intérêts, il peut-être important de choisir quel type d'impôt nous voulons.
Il y a donc 1000 milliards d'euros à récupérer chaque année.
Les impôts sont de type différents : directs (impôts sur le revenu, les successions), indirects (TVA principalement)
de nature différentes : proportionnels (le même taux pour tout le monde, comme la CSG) ou progressif (l'IRPP ou impôt sur le revenu et les patrimoines des particuliers)
et pour taxer des bases différentes (on parle d'assiette) : les revenus du travail (pour l'impôt sur le revenu), les bénéfices ds entreprises (impôts sur les sociétés), les maisons et terrains (taxes foncières), la vente d'objets et de services (la TVA), etc sans compter les cotisations sociales qui ne sont pas considérés comme des impôts mais n'en sont pas moins obligatoires et votés chaque année par le Parlement.
Aujourd'hui, la complexité du système français le rend opaque. Cette opacité apparente nourrit des injustices réelles en matière de progressivité de l'impôt : certains ménages très riches paient moins en proportion que les classes moyennes ! La faute a de nombreuses "niches fiscales", certes, mais également à la conception même des principaux impôts, qui sur le papier semblent simples et vertueux (progressivité de l'impôt sur le revenu par exemple), mais combinés les uns aux autres construisent un système complexe et inégalitaire où 90% à 95% des Français sont désavantagés par rapport aux 5% les plus riches.
(voir http://www.revolution-fiscale.fr/Pour_u ... iscale.pdf pour télécharger l'ouvrage de Thomas Piketty/Camille Landais et Emmanuel Saez en libre accès)
Les revenus du travail sont aujourd'hui plus imposés que ceux nés de transactions financières ou immobilières. Un salarié devra toujours payer en proportion plus d'impôt qu'un propriétaire achetant et revendant ses maisons et ses appartements, ou simplement percevant des loyers qui suivent les prix du marché. Aujourd'hui, la rente rapporte davantage que le travail.
C'est un choix de société qui peut se défendre, mais que je ne partage pas. Comme le dit Thomas Piketty, "le passé dévore le présent". Et à ce rythme et dans les conditions actuelles on ne pourra pas obtenir des personnes à hauts revenus (je parle des 2 à 3% les plus riches, soit quelques dizaines de milliers de personnes seulement) qu'elles investissent massivement dans la production, l'emploi et la compétitivité.
Les conséquences financières et sociales d'une telle situation fiscale risquent de peser lourdement sur les équilibres économiques du pays : disparition de services publics, contractions des domaines de l'éducation, de la justice et de la santé notamment pouvant avoir des effets secondaires dévastateurs : crise prolongée, dénatalité, fragilisation des infrastructures (équipements, formation, santé...) et à terme perte de compétitivité des salariés.
De nombreux économistes semblent arriver à la conclusion que la prospérité d'un pays est étroitement corrélé à son niveau de répartition des richesses :
derniers en date, Richard Wilkinson et Kate Pickett : Pourquoi l'égalité est-elle meilleure pour tous ? (http://www.alternatives-economiques.fr/ ... ation=1260 pour la critique) best-seller en Grande-Bretagne.
Muni de ces éléments de contexte, on peut en plus chercher à trouver une solution qui permette de répondre à toute une série d'exigences démocratiques :
- un système simple
- un système aisément compréhensible
- un système juste pour la plus grande majorité de la population.
Simplicité :
Force est de constater qu'avec ces milliers de taxes et cotisations diverses, le système actuel peut faire quelques heureux parmi les avocats fiscalistes mais laisse dans le désarroi complet des millions de gens. Une taxe simple permettrait de bien mieux la comprendre, et surtout de l'accepter.
Accessibilité :
Je ne sais pas si c'est parce que nous nous considérons comme un pays latin, mais j'ai l'impression que notre administration, malgré le grand dévouement de ses agents, semble avoir du mal à se rendre compréhensible à tous. Dans un monde parfait, ce n'est pas le citoyen qui devrait s'adapter à l'administration, mais l'inverse. Donc pour l'administration, réfléchir à la meilleure manière de répondre aux besoins des citoyens, et non les prendre comme des vaches à lait tatouées entre les cornes ou derrière les oreilles.... tout en conservant leurs données personnelles.
Justice :
Un vrai débat de fond : qu'est-ce que l'on doit taxer avant tout : la richesse ou la création de richesse ?
Qu'est ce que l'on désire encourager : la possession de maisons, de terres, ou bien le travail, l'investissement, le risque ? La transmission intégrale d'un patrimoine d'une génération à l'autre, ou bien une certaine égalité de départ de chacun à la naissance ?
Ce sont de vraies questions de fond, qui traversent la société depuis de nombreuses décennies, et l'on doit essayer de ne pas caricaturer les arguments et les opinions des uns et des autres, (déjà parce que c'est trop facile, ensuite parce qu'on doit quand même faire avancer le schmiliblick donc autant ne pas perdre trop de temps) tout en gardant à l'esprit que l'intérêt de la majorité de la population (je pense plutôt à 90% qu'à 51%) doit l'emporter.
Pour ma part, et ce qui suit relève davantage de mon opinion personnelle, il me semble que trop favoriser la rente au détriment du travail et de la création de richesse apparaît contre-productif pour une société. Perpétuer les inégalités d'une génération à l'autre n'est pas bon non plus au-delà d'un certain seuil. Chacun doit pouvoir avoir sa chance dans une société : avoir droit à la santé, la formation, la justice de manière gratuite semble une condition sine qua non pour permettre au pays de se renouveler et de garantir sa compétitivité sur le long terme. De même, encourager le travail, l'investissement et la prise de risque permettra de donner au pays les arguments qui l'empêchent aujourd'hui de conquérir de nouveaux marchés.
L'Histoire nous apprend que ce sont les nations qui furent les plus aventureuses qui réussissent le mieux : plus souples, plus réactives, elles balaient les empires vermoulus de contradictions et établissent de nouvelles règles : l'émergence, l'apogée et le déclin de Rome en est un bel exemple sur le temps long. La chute de l'Empire chinois ou ottoman au début du 20ème siècle est révélateur que ces sociétés, tournées vers le passé et incapables de se réformer, n'ont pas su prévenir ni contenir la poussée de nouvelles nations plus audacieuses : France, Grande-Bretagne, Hollande à l'époque. Aujourd'hui, l'Europe souffre de son passé et de sa pyramide des âges, contre l'émergence de nations "de jeunes" (part des moins de 20 ans dans les économies émergentes très importante !).
De fait, si l'on n'est pas capables de prendre aujourd'hui les risques qui nous permettront demain de ne pas être balayés par la concurrence mondiale, alors nous pourrons rejoindre les empires déchus du passé qui peuplent nos livres d'histoire.
En bref, initier une réforme qui taxerait davantage la création de richesse issue de la transmission d'un patrimoine mort que la création de richesses issues du travail des salariés semblent peu à peu devenir évident à mon esprit.
Les "pigeons" et autres représentants des classes moyennes et des contribuables, s'ils défendent vraiment la création de richesse par le travail comme ils le proclament, devraient opiner du chef à la lecture de ce qui suit.
Pour cela, je propose quelques mesures fortes permettant de bien traduire cette philosophie en actes et initier les changements qui s'imposent :
1/ suppression de la TVA, impôt indirect et injuste par excellence, lointain successeur de la gabelle détestée par nos ancêtres. inventé en 1954 par un Parlement ne sachant pas comment financer la guerre d'Indochine, son caractère discret en a fait le chouchou de tous les gouvernements de France... et d'ailleurs (comme quoi le made in France, c'est pas toujours ça) ! Une vraie régression démocratique à lui tout seul (son compter son inefficacité économique). A supprimer !
2/ regroupement de l'ensemble des impôts et cotisations émanant du travail en un seul impôt unique (IRPP+CSG+IS+cotisations sociales, salariales et patronales) perçu par l'Etat. Proportionnel ou légèrement progressif. Avec prélèvement à la source pour les salaires. Un vrai choc de simplification. (Je veux pas dire, mais on passe pour des Cro-Magnon pour d'autres pays de ce côté-là. On a les meilleurs fiscalistes du monde et nous n'avons même pas réussi à établir le prélèvement à la source! On doit encore avoir un fond de Gaulois dans nos gènes).
3/ Un contrôle public des comptes des grandes entreprises. aujourd'hui, nos inspecteurs des finances, issus de l'ENA, formés et payés par l'Etat, se font un plaisir de se faire embaucher par les grosses boîtes pour pouvoir "optimiser" leurs revenus. Il est sans doute temps que ces purs produits de la République redeviennent loyaux envers la communauté qui a payé leurs études. Il est de notoriété publique que les grandes structures sont les principales responsables des cas d'évasion et de fraude fiscale. Imposer un contrôle ou le morcellement en petites unités de ces mastodontes industriels ne pourra être que bénéfique pour le dynamisme et la compétitivité de nos entreprises.
4/ Une taxation progressive des revenus sur le capital, et notamment le patrimoine immobilier (on lira avec intérêt les conclusions de Thomas Piketty dans Le Capital au 21ème siècle). Pour éviter la taxation abusive de propriétaires pauvres (qui est une réalité sociale), la taxation pourra s'effectuer au moment de toute transaction passant devant notaire (étant par ailleurs officier ministériel), à partir d'une double assiette : - une taxe annuelle "virtuelle" basée sur la valeur locative à jour du bien (équivalent de notre taxe foncière actuelle) ; - une taxe spéciale sur le bénéfice issu de la mutation, au moment de celle-ci (le fameux prélèvement à 15,5% qui a fait couler tant d'encre ces jours-ci). L'objectif étant de protéger le petit propriétaire mais de taxer à mort le spéculateur.
Dans ce système, plus de taxes indirectes. Tous les prix TTC seront HT. Un salaire brut = un salaire net. L'entreprise paye un seul impôt, et c'est tout. La paperasse disparaît. Le salarié n'aura pas à payer un impôt sur son salaire, tout étant prélevé à la source. Le patron, s'il veut travailler et gagner sa vie, aura le droit de bien la gagner. L'entrepreneur pourra transmettre le patrimoine accumulé au long de sa vie et de son travail à ses enfants, mais dans la limite du raisonnable. Le système encouragera la hausse des salaires et non leur blocage au niveau du SMIC. Les grands groupes ne seront plus incités à se délocaliser. les infrastructures nécessaires à la compétitivité du pays seront maintenues, et même améliorées.
Voilà en quelques lignes les bénéfices qui pourront être tirés d'une réforme vigilante et consensuelle du système fiscal français. Des améliorations sont à apporter, toujours dans le sens de la simplicité, de la bonne compréhension des enjeux fiscaux et de la traque de toutes sortes de "profiteurs fiscaux" qui ruinent la contribution de millions d’honnêtes citoyens.
Certaines personnes pourront écrire demain un chapitre de l'histoire fiscale de France, qui est une des matrices principales de l'histoire de France. Une occasion se présentera peut-être bientôt. Qui a envie de participer ?
nouveau venu sur le forum, je réfléchis depuis de nombreuses semaines à notre situation fiscale et les actualités des derniers jours précipitent l'idée de faire partager mes réflexions et mes conclusions personnelles.
Ce post souhaite venir en complément des sujets précédents, notamment sur les droits de succession : economie-emploi/reforme-sur-heritage-t11005.html
et sur la progressivité de l'impôt sur le revenu :
economie-emploi/progressivite-impot-sur-revenu-t8942.html
La réflexion sur la fiscalité me semble essentielle aujourd'hui au vu du contexte actuel :
- publication du "Capital au 21ème siècle" par Thomas Piketty -> http://www.liberation.fr/economie/2013/ ... picks=true pour une interview (parmi d'autres) de l'auteur
- débats houleux sur la fiscalité ("ras-le-bol" fiscal, écotaxe en Bretagne, hausses de la TVA)
- besoin de réflexion vers un système plus juste (Badinter sur France Inter dans Tous politiques)
- fraudes et évasions fiscales régulièrement évoquées dans les médias.
Le débat sur l'impôt est ancien et a fait l'objet de nombreuses mobilisations, révoltes, lois, mouvements au fil de l'histoire (lire Nicolas DELALANDE, Les batailles de l'impôt pour un récit historique riche et documenté sur la période 1789-2000). Le débat actuel n'est qu'un énième épisode d'une lutte séculaire.
Chaque année, la France a besoin de collecter environ 1000 milliards d'€ pour assurer le fonctionnement des services publics et la protection sociale, qui représentent un plus de 50% du PIB.
Régulièrement, certains acteurs du débat public évoquent le "ras-le-bol" fiscal des Français, notamment la classe moyenne, et appellent à payer soit moins d'impôts, soit moins de charges sociales pour préserver la compétitivité du pays.
Entre beaux discours et vrais intérêts, il peut-être important de choisir quel type d'impôt nous voulons.
Il y a donc 1000 milliards d'euros à récupérer chaque année.
Les impôts sont de type différents : directs (impôts sur le revenu, les successions), indirects (TVA principalement)
de nature différentes : proportionnels (le même taux pour tout le monde, comme la CSG) ou progressif (l'IRPP ou impôt sur le revenu et les patrimoines des particuliers)
et pour taxer des bases différentes (on parle d'assiette) : les revenus du travail (pour l'impôt sur le revenu), les bénéfices ds entreprises (impôts sur les sociétés), les maisons et terrains (taxes foncières), la vente d'objets et de services (la TVA), etc sans compter les cotisations sociales qui ne sont pas considérés comme des impôts mais n'en sont pas moins obligatoires et votés chaque année par le Parlement.
Aujourd'hui, la complexité du système français le rend opaque. Cette opacité apparente nourrit des injustices réelles en matière de progressivité de l'impôt : certains ménages très riches paient moins en proportion que les classes moyennes ! La faute a de nombreuses "niches fiscales", certes, mais également à la conception même des principaux impôts, qui sur le papier semblent simples et vertueux (progressivité de l'impôt sur le revenu par exemple), mais combinés les uns aux autres construisent un système complexe et inégalitaire où 90% à 95% des Français sont désavantagés par rapport aux 5% les plus riches.
(voir http://www.revolution-fiscale.fr/Pour_u ... iscale.pdf pour télécharger l'ouvrage de Thomas Piketty/Camille Landais et Emmanuel Saez en libre accès)
Les revenus du travail sont aujourd'hui plus imposés que ceux nés de transactions financières ou immobilières. Un salarié devra toujours payer en proportion plus d'impôt qu'un propriétaire achetant et revendant ses maisons et ses appartements, ou simplement percevant des loyers qui suivent les prix du marché. Aujourd'hui, la rente rapporte davantage que le travail.
C'est un choix de société qui peut se défendre, mais que je ne partage pas. Comme le dit Thomas Piketty, "le passé dévore le présent". Et à ce rythme et dans les conditions actuelles on ne pourra pas obtenir des personnes à hauts revenus (je parle des 2 à 3% les plus riches, soit quelques dizaines de milliers de personnes seulement) qu'elles investissent massivement dans la production, l'emploi et la compétitivité.
Les conséquences financières et sociales d'une telle situation fiscale risquent de peser lourdement sur les équilibres économiques du pays : disparition de services publics, contractions des domaines de l'éducation, de la justice et de la santé notamment pouvant avoir des effets secondaires dévastateurs : crise prolongée, dénatalité, fragilisation des infrastructures (équipements, formation, santé...) et à terme perte de compétitivité des salariés.
De nombreux économistes semblent arriver à la conclusion que la prospérité d'un pays est étroitement corrélé à son niveau de répartition des richesses :
derniers en date, Richard Wilkinson et Kate Pickett : Pourquoi l'égalité est-elle meilleure pour tous ? (http://www.alternatives-economiques.fr/ ... ation=1260 pour la critique) best-seller en Grande-Bretagne.
Muni de ces éléments de contexte, on peut en plus chercher à trouver une solution qui permette de répondre à toute une série d'exigences démocratiques :
- un système simple
- un système aisément compréhensible
- un système juste pour la plus grande majorité de la population.
Simplicité :
Force est de constater qu'avec ces milliers de taxes et cotisations diverses, le système actuel peut faire quelques heureux parmi les avocats fiscalistes mais laisse dans le désarroi complet des millions de gens. Une taxe simple permettrait de bien mieux la comprendre, et surtout de l'accepter.
Accessibilité :
Je ne sais pas si c'est parce que nous nous considérons comme un pays latin, mais j'ai l'impression que notre administration, malgré le grand dévouement de ses agents, semble avoir du mal à se rendre compréhensible à tous. Dans un monde parfait, ce n'est pas le citoyen qui devrait s'adapter à l'administration, mais l'inverse. Donc pour l'administration, réfléchir à la meilleure manière de répondre aux besoins des citoyens, et non les prendre comme des vaches à lait tatouées entre les cornes ou derrière les oreilles.... tout en conservant leurs données personnelles.
Justice :
Un vrai débat de fond : qu'est-ce que l'on doit taxer avant tout : la richesse ou la création de richesse ?
Qu'est ce que l'on désire encourager : la possession de maisons, de terres, ou bien le travail, l'investissement, le risque ? La transmission intégrale d'un patrimoine d'une génération à l'autre, ou bien une certaine égalité de départ de chacun à la naissance ?
Ce sont de vraies questions de fond, qui traversent la société depuis de nombreuses décennies, et l'on doit essayer de ne pas caricaturer les arguments et les opinions des uns et des autres, (déjà parce que c'est trop facile, ensuite parce qu'on doit quand même faire avancer le schmiliblick donc autant ne pas perdre trop de temps) tout en gardant à l'esprit que l'intérêt de la majorité de la population (je pense plutôt à 90% qu'à 51%) doit l'emporter.
Pour ma part, et ce qui suit relève davantage de mon opinion personnelle, il me semble que trop favoriser la rente au détriment du travail et de la création de richesse apparaît contre-productif pour une société. Perpétuer les inégalités d'une génération à l'autre n'est pas bon non plus au-delà d'un certain seuil. Chacun doit pouvoir avoir sa chance dans une société : avoir droit à la santé, la formation, la justice de manière gratuite semble une condition sine qua non pour permettre au pays de se renouveler et de garantir sa compétitivité sur le long terme. De même, encourager le travail, l'investissement et la prise de risque permettra de donner au pays les arguments qui l'empêchent aujourd'hui de conquérir de nouveaux marchés.
L'Histoire nous apprend que ce sont les nations qui furent les plus aventureuses qui réussissent le mieux : plus souples, plus réactives, elles balaient les empires vermoulus de contradictions et établissent de nouvelles règles : l'émergence, l'apogée et le déclin de Rome en est un bel exemple sur le temps long. La chute de l'Empire chinois ou ottoman au début du 20ème siècle est révélateur que ces sociétés, tournées vers le passé et incapables de se réformer, n'ont pas su prévenir ni contenir la poussée de nouvelles nations plus audacieuses : France, Grande-Bretagne, Hollande à l'époque. Aujourd'hui, l'Europe souffre de son passé et de sa pyramide des âges, contre l'émergence de nations "de jeunes" (part des moins de 20 ans dans les économies émergentes très importante !).
De fait, si l'on n'est pas capables de prendre aujourd'hui les risques qui nous permettront demain de ne pas être balayés par la concurrence mondiale, alors nous pourrons rejoindre les empires déchus du passé qui peuplent nos livres d'histoire.
En bref, initier une réforme qui taxerait davantage la création de richesse issue de la transmission d'un patrimoine mort que la création de richesses issues du travail des salariés semblent peu à peu devenir évident à mon esprit.
Les "pigeons" et autres représentants des classes moyennes et des contribuables, s'ils défendent vraiment la création de richesse par le travail comme ils le proclament, devraient opiner du chef à la lecture de ce qui suit.
Pour cela, je propose quelques mesures fortes permettant de bien traduire cette philosophie en actes et initier les changements qui s'imposent :
1/ suppression de la TVA, impôt indirect et injuste par excellence, lointain successeur de la gabelle détestée par nos ancêtres. inventé en 1954 par un Parlement ne sachant pas comment financer la guerre d'Indochine, son caractère discret en a fait le chouchou de tous les gouvernements de France... et d'ailleurs (comme quoi le made in France, c'est pas toujours ça) ! Une vraie régression démocratique à lui tout seul (son compter son inefficacité économique). A supprimer !
2/ regroupement de l'ensemble des impôts et cotisations émanant du travail en un seul impôt unique (IRPP+CSG+IS+cotisations sociales, salariales et patronales) perçu par l'Etat. Proportionnel ou légèrement progressif. Avec prélèvement à la source pour les salaires. Un vrai choc de simplification. (Je veux pas dire, mais on passe pour des Cro-Magnon pour d'autres pays de ce côté-là. On a les meilleurs fiscalistes du monde et nous n'avons même pas réussi à établir le prélèvement à la source! On doit encore avoir un fond de Gaulois dans nos gènes).
3/ Un contrôle public des comptes des grandes entreprises. aujourd'hui, nos inspecteurs des finances, issus de l'ENA, formés et payés par l'Etat, se font un plaisir de se faire embaucher par les grosses boîtes pour pouvoir "optimiser" leurs revenus. Il est sans doute temps que ces purs produits de la République redeviennent loyaux envers la communauté qui a payé leurs études. Il est de notoriété publique que les grandes structures sont les principales responsables des cas d'évasion et de fraude fiscale. Imposer un contrôle ou le morcellement en petites unités de ces mastodontes industriels ne pourra être que bénéfique pour le dynamisme et la compétitivité de nos entreprises.
4/ Une taxation progressive des revenus sur le capital, et notamment le patrimoine immobilier (on lira avec intérêt les conclusions de Thomas Piketty dans Le Capital au 21ème siècle). Pour éviter la taxation abusive de propriétaires pauvres (qui est une réalité sociale), la taxation pourra s'effectuer au moment de toute transaction passant devant notaire (étant par ailleurs officier ministériel), à partir d'une double assiette : - une taxe annuelle "virtuelle" basée sur la valeur locative à jour du bien (équivalent de notre taxe foncière actuelle) ; - une taxe spéciale sur le bénéfice issu de la mutation, au moment de celle-ci (le fameux prélèvement à 15,5% qui a fait couler tant d'encre ces jours-ci). L'objectif étant de protéger le petit propriétaire mais de taxer à mort le spéculateur.
Dans ce système, plus de taxes indirectes. Tous les prix TTC seront HT. Un salaire brut = un salaire net. L'entreprise paye un seul impôt, et c'est tout. La paperasse disparaît. Le salarié n'aura pas à payer un impôt sur son salaire, tout étant prélevé à la source. Le patron, s'il veut travailler et gagner sa vie, aura le droit de bien la gagner. L'entrepreneur pourra transmettre le patrimoine accumulé au long de sa vie et de son travail à ses enfants, mais dans la limite du raisonnable. Le système encouragera la hausse des salaires et non leur blocage au niveau du SMIC. Les grands groupes ne seront plus incités à se délocaliser. les infrastructures nécessaires à la compétitivité du pays seront maintenues, et même améliorées.
Voilà en quelques lignes les bénéfices qui pourront être tirés d'une réforme vigilante et consensuelle du système fiscal français. Des améliorations sont à apporter, toujours dans le sens de la simplicité, de la bonne compréhension des enjeux fiscaux et de la traque de toutes sortes de "profiteurs fiscaux" qui ruinent la contribution de millions d’honnêtes citoyens.
Certaines personnes pourront écrire demain un chapitre de l'histoire fiscale de France, qui est une des matrices principales de l'histoire de France. Une occasion se présentera peut-être bientôt. Qui a envie de participer ?