Pour commencer, je pense qu'il faut tenter le plus possible de rester serein dans ce débat considérant le fait que l'économie n'est en rien une science. Il n'y a pas de loi universelle, ni de théorème, il n'y a que des tendances plus ou moins vérifiables du fait que l'acteur principal étant plus ou moins rationnel, on ne peut pas prévoir à coup sûr sa réaction en fonction d'un stimuli. Ainsi, divers écoles s'opposent en essayant le plus possible de trouver un consensus plutôt mou ou, à défaut, d'imposer une norme en force quitte faire quelques impasses de raisonnement. De plus, et considérant ce qui précède, il convient d'éviter des expressions radicales (CATASTROPHE, ENORME ) ou désobligeantes (STUPIDE, IGNORANCE ) qui, en plus de ne pas crédibiliser le propos de leurs auteurs, limite fortement le débat.
Précision, je ne suis pas partisan strict d'une idéologie, je ne suis pas un professionnel de l'économie mais dans l'économie. Je me borne à me faire une opinion en considérant les avantages/inconvénients confronté à la réalité, accessoirement au passé, sans présumer de l'avenir.
Sims a écrit :-Le premier exemple qui me vient à l'esprit: la fin des taux de change flottants.
Il n'est pas question d'abolir le système des taux de changes flottants pour un régime fixe et immuable, il est question d'adosser la monnaie à une valeur du monde réelle. Le système des taux de changes flottants présume en la capacité du marché à se réguler en fonction des fondamentaux économiques. Ce qui tends à revenir au même d'ailleurs sauf que dans le premier cas, le taux est apprécié par un nombre restreint d'individu (généralement l'état) et dans le second par l'ensemble des acteurs du marché. Le premier va donc à l'encontre de la pensée économique libérale. Là encore, un système comme un autre ne peut pas être parfait car il est aussi légitime de penser que l'état va agir dans des intérêts qui lui sont propres (à priori électoral) que de penser que le marché peut être soumis à un comportement irrationnel ou influençable. Le yuan chinois a un taux de change fixe, indexé sur un panier de monnaies dont le cours est fixé quotidiennement par l'état; ce qui peut s'apparenter à un change flottant mais sans aucune obligation.
Sims a écrit :C'est le problème que nous avons avec l'euro, des pays très différents d'un point de vue développement économique se retrouvent avec les mêmes taux d'intérêts pour leur prêts tout en pouvant avoir des politiques éco diamétralement opposées.
Non, les taux d'intérêts n'ont jamais été identique. Il y avait certes un faible écart mais le marché pouvait fixer un taux différent. Le principal gain de la monnaie unique pour ces économies ce sont les règles qui devait être respectés pour entrer dans la zone, contribuant ainsi à maintenir un certain cliamt de confiance. A ce titre, la faute vient du système lui-même, et le marché et l'eurozone, qui n'a pas su détecter, ou pas voulu reconnaitre soit à dessein, soit par optimisme, la faiblesse grecque, faiblesse du fait du politique pas qu'économique du reste.
Sims a écrit :leur entrée en zone euro a grandit énormément leur capacité d'endettement en alignant leur "solvabilité" virtuellement sur celle de pays comme l'Allemagne ou la France
C'est vrai en partie mais c'est aussi le but. Un pays plus faible économiquement a une meilleure marge de manoeuvre dans des échanges à base d'une monnaie stable. La solvabilité n'est qu'une appréciation des agents économiques et dans la mesure où elles ne peuvent pas émettre cette monnaie, elles ne peuvent pas en abuser. Par contre, cela peut être considéré comme un frein notamment pour leurs exportations dans des marchés fortement concurrentiels et quand leur capacité à générer de la richesse n'est pas au même niveau qu'un pays comme la France ou l'Allemagne.
Sims a écrit :On peut aussi parler de l'Espagne qui est à pas grand chose de tomber aussi
L'Espagne comme le Portugal ont fortement bénéficié de crédit européens du début des années 80 jusqu’au milieu des années 90. Je pense qu'il y a eu euphorie de penser qu'il était possible de doper une économie sans base solide. Lorsque l'union a eu tendance à se développer, et donc les aides à plus se répartir, l'Espagne a cru que l'immobilier pouvait les maintenir à flots. Même s'il y avait de fort besoin d’infrastructures pour être au même niveau que les pays n'ayant pas subit de période franquiste, saturer un marché n'était pas forcément le meilleur des choix
Sims a écrit : ce serais dire que toutes les monnaies se valent, ce qui est faux puisque toutes les zones monétaires n'ont pas la même croissance, inflation, taux d'intérêts.
Le taux de change fixe ne dit pas çà, il est certes moins flexible mais il admet que toutes les monnaies ne se valent pas. Ceci dit je suis d'accord qu'il est illusoire de penser que l'eurozone est à considéré comme un bloc unique alors que chaque pays conserve ses spécificités et sa politique économique. Toutefois, serions nous prêts à plus d'Europe en l'état actuel de ses institutions ?
Sims a écrit :imposer une cotation par jour et par valeur.
Je serai assez d'accord sur le mythe du dirigisme du marché toutefois, il faut admettre que cela limite les comportements irrationnels (explosion d'un cour vu comme une valeur refuge au détriment des réalités économiques) par contre "Qui te dis que demain, ton action n'auras pas perdu 12%", le système actuel ne le garantit pas non plus, loin de là. La seule crainte à avoir est une fuite des capitaux vers des marchés plus libres.
Sims a écrit :-supprimer la spéculation sur les produits dérivés
Si tu parles d'ignorance, il faudrait peut être expliquer ce qu'est un produit dérivé ... Un produit dérivé est un contrat financier à terme adossé à un actif sous-jacent., c'est-à-dire qu'on échange le produit et non l'actif, ce quipeut être vu comme plus commode. Par contre, tu cites un produit d'un OPCVM, c'est-à-dire un portefeuille de titre (action, obligation, monnaie) et pas un produit dérivé. Un tel portefeuille basé sur des valeurs CAC40 aura tendance à diluer le risque sur l'ensemble des valeurs considérées. Si une valeur chute et qu'une autre augmente, il y a compensation. Ce type de portefeuille permet à des investisseurs de participer au marché sans forcément y être présent en permanence (= suivre les cours, effectuer les opérations) en déléguant la gestion du portefeuille à l'organisme. On arrive au même résultat sans mais il est plus simple et moins risqué pour de petits épargnant de se placer sur le marché via ce type de produit. Toutefois, à la différence d'une portefeuille traditionnel, l'opcvm doit respecter un contrat sur les titres utilisés. Un portefeuille orienté CAC40 subira l'orientation générale du CAC40 même si, il est vrai, avec un amortissement et un décalage dans le temps mais ne pourra pas s'orienter ailleurs pour cherche une stabilité, ce qu'un gestionnaire de portefeuille ferait.
Le produit dérivé est un contrat à terme. L'acheteur et le vendeur s'entende sur un prix pour un actif à une date donnée. Si je suis producteur de blé et que je veux anticiper mon revenu quand ma production sera effectivement sur le marché dans 6 mois, je peux m'entendre avec ce type de contrat. L'acheteur s'engage à acheter à un prix fixé d'avance. Si à terme, le prix de marché est supérieur, j'ai un manque à gagner, s'il est inférieur, l'acheteur a perdu de l'argent. L'acheteur spécule sur la hausse. Si je suis producteur de biscuit, je peux passer le même type de contrat avec un vendeur. Si à terme, le prix de marché est supérieur, le vendeur a perdu de l'argent (il doit vendre moins cher), s'il est inférieur, j'ai un manque à gagner. Le vendeur spécule sur la baisse. Ca semble de bonne guerre sauf que l'acheteur de l'actif n'a pas besoin de le financer totalement au départ du contrat. Il donne une garantie (on va dire 10%) et la totalité sera perçu à terme. Ainsi, un spéculateur peut prendre différentes positions avec une mise de départ faible avec le risque de perdre ou de gagner beaucoup au final. A ce moment, le cours de l'actif peut subir des variations importantes sans relation avec la réalité économique. C'est ce type de pratique qui est à risque car je peux emprunter auprès d'une banque une somme avec laquelle je prends des positions et perdre mon pari tout en faisant peser le risque final sur la banque lorsque je suis devenu insolvable.
Sims a écrit :-Rendre la création monétaire aux états
J'ai déjà exprimé ma position sur le sujet et je comprends ta réticence. La création monétaire doit revenir à une instance qui ne soit ni l'état, ni le marché. Ainsi, la spéculation peut toujours se faire avec une base d'emprunt mais sur un emprunt fait au marché, donc avec une juste évaluation du risque pris au final. Le but est de limiter la dérive qui tends à faire peser indirectement le risque sur la société.
Sims a écrit :-Séparation des activités de dépôt des activités d'investissement
J'ai déjà expliqué plus haut pourquoi c'était une fausse bonne idée et en quoi ça allais encourager les banques à faire des crédits plus risqués pour les personnes habituellement considérées insolvables.
Le concept 100% monnaie préconise la séparation en 3 activités :
- dépôt, 100% sécurisé, concept de "havre". Pas de risque, pas de rendement mais avec paiement en contrepartie du service
- prêt, à risque contenu, rendement faible
- affaire, à risque fort et rendement fort
Ceci dit, ce cloisonnement, quel que soit le mode, est soutenu par des théoriciens comme Allais ou Friedman mais aussi par des banquiers ou par des politiques (Rocard) Soutenir que c'est une erreur implique de favoriser une théorie plutôt qu'une autre en mettant en avant une loi qui n'est pas prouvée et qui ne le sera jamais d'ailleurs. Par contre, la réalité existe : Sans séparation, il y a bien eu dérive sur les crédits immobiliers en prêtant justement des fonds à des ménages à risque(subprime) en considérant que, via un produit financier intermédiaire, on pouvait compenser ce risque en le liant à un autre prêt à un ménage sûr (prime). En résumé, prenons un produit liant trois types de prêts :
- 1/3 de prêt sans risque mais avec peu de rendement
- 1/3 de prêt avec risque moyen et rendement moyen
- 1/3 de prêt avec risque fort et rendement fort
On considère que le défaut du dernier 1/3 et compensé par la stabilité du premier. On le note AAA (placement sûr) et on spécule. Pour gaver la machine, on incite à plus de prêt ce qui tends à doper le marché immobilier.
Quand le dernier 1/3 fait défaut, on compense sur les deux autres, avec la revente de l'actif financé et l'augmentation du taux d'intérêt du prêt (variable pour l'occasion). Quand le second fait défaut, on s'inquiète et on commence à se débarrasser du produit car le 1/3 le plus solvable et la revente de l'actif ne maintient plus le rendement. Le marché financier se refile de plus en plus la patate chaude, le marché réel de l'immobilier se rectifie. Le 1/3 le plus solvable se rends alors compte que le bien qu'il finance ne vaut plus rien dans la réalité et se met en défaut. On se retrouve avec un marché saturé, des positions prises qui ne valent plus rien car complètement dé corrélées de la réalité et le système s'écroule. Sauf qu'au passage, des banques ont pris positions directement et/ou indirectement et ne sont plus en mesure d'honorer leurs engagements. Elles tentent de se financer ailleurs mais vu que la confiance n'y est plus, elles doivent passer le tout en perte et être en situation de faillite technique et attende l'intervention de l'état, pour le coup vraiment providentielle.
Certains diront que la spécialisation n'a pas protégé les banques en prenant pour exemple Northen Rock qui ne faisait que du détail, c'est vrai sauf que celle-ci était spécialisée dans le crédit immobilier ...
Sims a écrit :J'ai déjà dis à plusieurs reprises qu'il étais imprudent de prendre comme argent comptant les propositions d'un premier bouquin venu sans les avoir étudiées de près avec les diverses implications qu'elles pourraient entrainer. Particulièrement en économie.
C'est la même pour Roosevelt 2012, ou on a préféré insérer en vitesse un truc bancale juste parce que "ça a l'air cool".
Je suis d'accord, j'ai d'ailleurs pris position contre l'intégration en l'état des mesures du collectif. Toutefois, je pose juste une question : Si ces propositions ne sont pas recevables, où sont les solutions du secteur financier ? Ah si les crises c'est normale, il y en a toujours, etc. etc. etc. donc même si le système est faillible, on ne bouge pas d'un pouce et on attends la prochaine ... sauf que le citoyen lui qui a perdu son emploi depuis 2009, qui survit tant bien que mal et à qui on explique que la dette c'est surtout dû au fait qu'il en veut plus pour pas grand chose, n'a sûrement pas la même conception de la fatalité et des aléas de la vie.