Merci Sims pour ta réponse. Par contre, c'est bizarre la liste des propositions que tu contre-argumente, je savais pas qu'elle venait de Maurice Allais, pour moi, ce que tu cites correspond plus à des propositions pour certaines un peu simplistes qu'on entend ici ou là, et avec lesquels je suis pas non plus spécialement d'accord. Dans le papier que j'avais lu de lui, les choses que j'avais trouvé très intéressantes c'était plutôt ça (pour ce que je m'en souviens):
* le concept "100% monnaie" qu'expliquait flecointre,
* l'affirmation comme quoi le libre échange n'est positif qu'entre espaces économiquement et démocratiquement cohérents (sans pour autant oublier que la limite entre "cohérent" et "pas cohérent" est forcément très floue et la question de savoir quand est-ce qu'un espace est suffisamment cohérent pour que le libre-échange y soit positif)
* la re-démocratisation de la banque centrale restant séparée de l'état
* la redirection des bénéfices liés à l'extension de la masse monétaire vers le budget de l'état sous forme de monétisation pure et simple.
Mais bon, on est effectivement là pour débattre de chacune des propositions qui émane d'où que ce soit et l'objectif est moins de tomber d'accord que de s'éclairer mutuellement nos lanternes.
Juste histoire que les choses soient bien clair, moi ce que j'appelle l'état, c'est l'ensemble des trois pouvoirs législatifs, exécutifs et judiciaire. Le pouvoir exécutif comprenant l'ensemble de la hiérarchie qui lui est soumis : premier ministre, ministres, employés des ministères et fonctionnaires du service public.
Alors oui, pour info, un particulier ou une entreprise font faillite, pas un état. Si je ne dis pas de bêtise, une faillite, c'est un truc encadré par la Loi où l'état dépêche un huissier de justice pour saisir les biens du débiteur et les revendre aux enchères afin de rembourser au maximum le créancier, le restant de l'emprunt étant une perte sèche pour le créancier. C'est un élément du cadre assuré par l'état qui sert à ce que l'économie fonctionne sans que le créancier n'ait recours à des mafieux pour recouvrer le bien qu'il a prêté. Ca ne fonctionne pas comme ça pour la dette souveraine d'un état, parce qu'il n'y a personne au dessus de l'état pour lui imposer de restituer ce qu'on lui a prêté. Un banquier aura du mal à rentrer dans une base militaire et y récupérer une arme sous prétexte que ça a été payé avec l'argent qu'il a prêté.
La seule exception à la règle, c'est quand le créancier se trouve un autre état pour lancer une guerre contre son débiteur. A ma connaissance, le seul exemple historique, c'est le Mexique en 1861 où la France avait envoyé son armée (
http://fr.wikipedia.org/wiki/Intervention_fran%C3%A7aise_au_Mexique). Enfin là, l'objectif de la guerre en question était très fortement mâtiné de visées impérialistes.
La plupart du temps quand un état fait défaut, c'est une perte sèche pour ses créanciers, c'est d'ailleurs ce risque qui justifie la hausse des taux d'intérêt dans les périodes difficiles. Maintenant oui, cette perte sèche a forcément des conséquences sur la santé financière du créancier en question. Si un trop grand nombre de ses débiteurs se mettent en défaut en même temps, il est tout à fait susceptible d'entrer lui-même en défaut de paiement, et donc en faillite si ce n'est pas lui-même un état. C'est d'autant plus facilement le cas quand le créancier est une banque, et donc que presque par définition, l'argent qu'elle prête provient en faible proportion de ses fonds propres (qui lui appartiennent à elle sans qu'on lui les ait prêtés) et en large proportion des dépôts des particuliers et aux refinancements de la banque centrale.
Comme en plus les banques pratiquent massivement la ré-assurance, c'est à dire que pour "limiter" les risques elles s'assurent mutuellement contre les défauts de leurs débiteurs, le principal risque si les états européens, les USA ou encore le Japon se mettent chacun à faire des défauts de paiement, c'est que le tout s'enchaine rapidement en une crise systémique avec défauts de paiements massifs de la plupart des acteurs du système financier mondial. Suivant comment on organise la chose, il n'y a aucune obligation à ce que les individus et les entreprises qui ont de l'argent sur leur compte en banque le perdent puisque l'important est que leurs données ne soient pas détruites. Mais ça fait néanmoins de violents remous et c'est forcément amplifié par une crise de confiance qui pousse chacun à se dépêcher de récupérer ce qu'il peut de ce qu'il a prêté à droite à gauche avant que ça n'arrive. Dans la mesure où la confiance est fortement dépendante des annonces de décisions politiques, ça aura toujours tendance à se déclencher par anticipation avant que les décisions ne soient prises, ce qui rend la chose très difficile à encadrer surtout par une démocratie qui est sensé débattre publiquement de ses orientations économiques avant de les appliquer et ne peut donc sensément pas se permettre de prendre ses acteurs économiques par surprise.
C'est effectivement dangereux de chercher à jouer avec ce système, et il faut le faire les yeux ouverts sur les risques encourus. Maintenant, il faut voir que le système en l'état où il est, est déjà très instable et c'est donc tout aussi dangereux de le laisser tourner tel quel. Dans l'absolu, le truc avec lequel je serais pas contre, serait d'imposer à l'état un déficit structurel nul (hors prêts pour grands investissements de style New Deal), mais seulement à un certain nombre de conditions qui ne sont pas remplies aujourd'hui:
* que la banque centrale soit sous contrôle démocratique
* que ce contrôle démocratique choisisse le taux d'inflation qui lui semblent bon
* que l'augmentation de la masse monétaire (dûes à l'inflation et à la croissance) passe par des versements d'argent de la banque centrale à l'état.
* que l'état ait néanmoins la possibilité de contracter des emprunts pour réaliser de grands investissements (l'investissement ne fait parti des déficit)
(à noter que ça implique pas d'autoriser l'état à emprunter au près de la banque centrale, c'est juste qu'il faut séparer le problème de la taille totale de la masse monétaire, du problème de la disponibilité du crédit)
PS @manudwarf : euh, je veux bien connaitre tes sources il me semblait que la France payait dans les 90 milliards d'euros d'intérêt par an pour un déficit total d'environ 140 milliards sur un budget total d'environ 500 milliards (
http://fr.wikipedia.org/wiki/Budget_de_l%27%C3%89tat_fran%C3%A7ais). Et j'avais cru comprendre que le PIB grec étant en chute libre, le poids de la dette augmentait au lieu de diminuer, et donc qu'au final le budget grec ne s'améliorait pas franchement au fur et à mesure où la situation humanitaire, en revanche s'y dégradait fortement. T'es sûr que c'est pas les prévisions optimistes faite à chaque plan d'austérité et infirmées à chaque fois par la réalité du terrain ?