Non, le suffrage universel n'est pas necessaire à la democratie. La seule democratie abouti (deux cents ans) fut censitaire.
Qualifier la
IIIème Republique Démocratie Athénienne de démocratie aboutie me paraît un peu rapide.
Basiquement pour moi République désigne un régime où les biens et l'intérêt de l'Etat sont bien distincts des biens et de l'intérêt des dirigeants/administrateurs. En d'autres termes une séparation en la propriété privé des dirigeants et la "chose publique" à l'inverse d'un système féodal ou d'une "république bananière". Par exemple dans une république la police ou la justice sont censément neutre et agissent dans l'intérêt général. Dans un système féodal chaque seigneur paie directement ses propres soldats etc
La démocratie renvoie à l'idée que c'est le pouvoir s'exerce par et pour le peuple.
A partir de là, République et Démocratie me paraissent souhaitable.
Le problème de l'élection et du suffrage universel se pose quand on essaie de résoudre le problème: comment garantir que le pouvoir s'exerce par le peuple?
L'élection au suffrage universel direct paraît être alors le meilleurs moyen d'y aboutir.
Le problème c'est la deuxième partie: comment garantir que le pouvoir s'exerce pour le peuple?
L'élection étant un mécanisme "par essence" (même si j'aime pas trop l'expression) aristocratique, car il vise bien à distinguer les "meilleurs" parmi le peuple[cf. note de bas de post], les risques de dérives oligarchiques sont très importantes sans contre pouvoir effectif. C'est là que le tirage au sort est intéressant.
Trois lignes sur Chouard et les grecs [y'a déjà eu de longs débats sur la question ici et ailleurs] : En gros dans la démocratie à la grecque (très éloignée du suffrage universel), les postes importants ("Stratèges")sont des postes pourvus par l'élection (le corps électoral étant "l'ensemble" des citoyens), et les élus sont contrôlés par des groupes de citoyens tirés au sort ("Archontes" ou "Héliée", qui pouvait prononcer des sanctions lourdes à l'encontre de l'élu mauvais gestionnaire) tandis que les lois sont rédigées par une assemblée tirée au sort (la Boulè).
Pour ce qui est du rôle des médias dans le choix de l'électeur, il est secondaire par rapport au rôle des proches (cf Lazarsfeld et alii,
The people choice: How the voter makes up his mind in a presidential election, confirmé récement par
l'étude Mediapolis dirigé par T. Vedel)
Note de bas de post: Je m'explique rapidement (il y a des nuances à faire mais c'est un peu long) sur "l'essence aristocratique" de l'élection mais je crois l'avoir déjà fait ailleurs. Dans la mesure où les principales qualités attendues d'un candidat (dans l'hypothèse idéal-typique d'un électeur rationnel) sont la qualité de l'expression orale et les compétences (mesurée par le niveau de diplôme), que celles ci proviennent de la formation du candidat, et que l'on admet qu'il existe des inégalités sociales face à l'éducation, d'autant plus renforcées par le système éducatif actuel (Cf. La Reproduction et Les Héritiers de P.Bourdieu, JC Passeron), qui favorisent les enfants des catégories sociales supérieures, on ne peut aboutir, par la voie de l'élection qu'à une oligarchie qui se recrute toujours dans les même catégories (oserais je le dire, classes ^^) sociales et qui se forme dans les mêmes écoles (ENA, Polytechnique, IEP-Paris, HEC,Faculté de Droit parisienne). D'où l'intérêt de la réforme du système éducatif souligné par Gna.
Dans une moindre mesure le phénomène de recrutement endogamique est similaire pour les médias et les journalistes.
Pour conclure, et répondre (presque) simplement à la question, oui, le suffrage universel est nécessaire à la démocratie à condition de bien définir son périmètre (on parlait déjà de suffrage universel avant 1944, quid du droit de vote des étrangers), qu'il soit dirigé à bon escient (quels sont les mandats pourvus par le vote?) mais surtout que l'on pallie aux nouvelles manifestation du cens (inégalités sociales qui mènent à des inégalités de participation politique)[cf
Gaxie, Le cens caché].Ce raisonnement est transposable à la démocratie intra-partisane.