Messagepar Berserk » mer. 30 déc. 2009, 00:13
Ce débat est très intéressant et à mon avis il vaut la peine d'être poursuivi, car il met le doigt sur des difficultés que nous allons souvent rencontrer à l'avenir.
Tout commence avec cette affirmation "le Parti Pirate n'est ni de droite ni de gauche"
En effet cette grille de lecture droite/gauche traditionnelle en politique française ne peut pas servir à étiqueter notre parti, tout simplement parce qu'elle est obsolète dans le cadre de la globalisation économique et de la société de l'information.
Notre parti s'inscrit dans un mouvement international où le débat franco-français droite/gauche est insignifiant.
Même la droite et la gauche de notre pays, aujourd'hui et depuis longtemps, ne s'inscrivent plus dans cette dialectique binaire.
La preuve nous en est donné par la politique" d'ouverture" de notre président, de sa tendance à se présenter comme un sauveur humaniste, ou encore par la gauche "caviar", qui en répondant aux sirènes du l'idéologie libérale, se fait dévorer par les intérêts à court terme et la "real politik".
Autant dire blanc bonnet et bonnet blanc : les uns mettent en avant la performance économique de notre pays tout en reconnaissant l'importance du social et des régulations étatiques d'un système capitaliste instable, et les autres mettent en avant le social et les régulations, tout en reconnaissant que nos valeurs doivent être portées par une économie forte sur la scène internationale.
Un simple constat : la gauche et la droite dans notre pays sont réunies non seulement par une même foi dans le dogme libéral, qui préserve les privilèges de la classe bourgeoise, mais également par une même vision corrompue et clientèliste du régime démocratique, où les lobbys font la Loi, littéralement, et les députés votent soumis à la discipline de groupe.
Or le Parti Pirate n'est ni un parti libéral ni un parti lobbyiste.
Ce n'est pas un parti libéral, tout simplement parce qu'il n'y a eu aucun vote de reconnaissance de l'idéologie libérale par ses membres, et parce que notre mouvement regroupe toutes les sensibilités sans aucune discrimination.
Raphaël nous parle souvent des origines philosophiques de l'idéologie libérale, qui étaient porteuses de rêve et d'utopie, et je pense que le rêve et l'utopie ont leur place dans notre parti, à condition de ne pas les utiliser comme une étiquette vidée de sens par les errements de tous ceux qui ont voulu réaliser leur vision particulière du libéralisme.
De même nous nous opposons aux lobbys, en dénonçant leurs pratiques de monopoles défiant la Loi de la concurrence, et trahissant les citoyens en leur proposant une image médiatique de la démocratie qui ne correspond pas à la réalité, bafouant leurs votes ainsi que l'intérêt général pour des intérêts privés à court terme.
Nous ne sommes donc ni à gauche, ni à droite.
En revanche nous avons en commun avec la gauche et la droite française certaines valeurs républicaines et démocratiques incarnées par "Liberté, égalité, fraternité", la nécessité d'une stabilité de l'Etat, et la poursuite d'un intérêt général qui théoriquement à l'origine de notre système juridique fondait la légitimité de la démocratie représentative.
Il est tentant en partant de ce constat, de prendre un autre système binaire, celui des américains, démocrates/républicains, ou conservateurs/réformistes, pour tenter de définir le parti pirate.
Mais nous sommes autant démocrates que républicains, dans le sens où nous portons les valeurs de la démocratie et de la République, qui nous ont été transmises par notre culture, notre Histoire, notre éducation. Nous demandons à la société et à l'Etat de ne pas trop règlementer Internet, qui est un espace d'innovation et de création et ne peut pas se soumettre à des logiques conformistes et rétrogrades.
Nous sommes conservateurs, car il nous semble que le monopole du consortium des maisons de productions culturelles met en danger les petits labels et les artistes indépendants, et par là toute la richesse de notre création, réduite à un petit millier d'artistes "officiels" qui ne peuvent pas incarner ni préserver notre culture. La réduction des catalogues des majors est un exemple d'atteinte du système du droit d'auteur à l'intégrité de notre diversité culturelle, qui est inscrite au patrimoine de l'humanité par la déclaration universelle de l'Unesco sur la diversité culturelle. Nous souhaitons conserver et valoriser le domaine culturel public, qui seul permet la transmission à tous de notre patrimoine culturel.
Nous sommes démocrates et réformateurs, car notre démarche politique est ouverte et appelle la participation de tous les citoyens qui ont envie de poser leur pierre à l'édifice. Pour la première fois en France depuis bien longtemps, les citoyens ont la possibilité de voter pour des idées neuves et même participer à construire ces idées. Ils ont la possibilité de s'approprier la vie politique, de se présenter s'ils le souhaitent, sans discrimination sociale ou idéologique, sans corruption par des lobbys. C'est ce qu'on appelle faire de la politique autrement, n'en déplaise aux grincheux.
La mise à plat du droit d'auteur et des brevets, et leur réforme, sont d'après nous nécessaires pour adapter la société et le système juridique qui l'organise à l'évolution de la société de l'information, où l'information, l'accès aux cultures et aux sciences sont un droit fondamental.
Nous sommes donc autant démocrates et réformistes que conservateurs et républicains, ce qui prouve par l'absurde que cette grille binaire ne convient pas non plus.
Nous sommes encore écologistes, puisque d'une part nous sommes alliés politiquement avec les verts au parlement européen, et que d'autre part nous sommes très sensibles à toutes les problématiques qui concernent l'impact des technologies et des industries sur notre environnement au sens large du terme, c'est à dire notre environnement social, psychologique, médiatique, climatique. Nous pouvons nous prononcer pour un développement durable, dans le sens où l'avenir de la société humaine a toujours été une de nos préoccupations majeures, quand nous dénonçons les abus du système des brevets et du droit d'auteur, quand nous rejetons la surveillance confondue avec la sécurité, quand nous condamnons les pratiques corruptrices des lobbys sur la justice, les parlements et les exécutifs.
Nous centrons le débat sur les valeurs républicaines et démocratiques sur lesquelles reposent l'identité française, sur l'éthique sans laquelle la science n'est que ruine de l'âme, sur la diversité sans laquelle notre culture n'est plus qu'une propagande. Toutes ces valeurs incarnent un développement durable et responsable, écologique au sens large du terme.
Dans ce débat, nous avons une question : sommes nous communistes ?
Il me paraît inévitable de dire que le communisme a beaucoup de ressemblance avec le libéralisme de notre point de vue, puisque ce sont deux idéologies philosophiques pleines de bons sentiments qui lorsqu'on les a appliquées ont abouti au désastre, à la répression et au dogmatisme. Ce sont donc deux étiquettes que le Parti Pirate ne devrait pas utiliser, tout en y piochant les idéaux, les valeurs, les idées que les membres de notre parti voudront bien plébisciter.
Pour le libéralisme, ce peut être un certain idéal de liberté, et pour le communisme il y a la grille de lecture de la lutte des classes, qui semble plus que jamais d'actualité.
Donner un libre accès à la culture, à Internet, aux médicaments, au vivant (=ne pas payer monsanto pour son brevet sur telle espèce qui nous nourrit alors qu'on a élevé le bétail soi-même) sont des mesures sociales qui permettraient de réduire la fracture sociale entre les classes. Dans ce sens, le Parti Pirate pourrait se diriger vers une remise en question fondamentale du système capitaliste qui a sanctifié la propriété intellectuelle et matérielle dans ses aspects les plus destructeurs et liberticides. Nous pourrions par exemple appliquer des tarifs en fonction des revenus pour les abonnements à Internet, l'équipement informatique et l'accès à la culture, c'est à dire les rendre gratuits pour les moins fortunés par exemple.
Remettre en question ce système en revanche, ça ne veut pas dire le détruire aveuglément.
Certaines propositions qui ont été exprimées par le Parti Pirate concernent la création d'assemblée locales et la dématérialisation de ces assemblées : en effet à l'origine la démocratie directe a été abandonnée parce qu'il était impossible de réunir autant de monde au même endroit à la même heure sans aucune manipulation ou main mise. Or avec Internet et les nouvelles technologies, nous avons la possibilité logicielle de nous assembler localement, de débattre et de voter.
Il y a donc un défi à relever, la démocratie sur Internet, qui nous intéresse au premier plan. Cependant cette idée d'assembler le peuple ne vient pas du communisme, ni des révolutionnaires, mais du contrat social de Rousseau.
Voila, c'était un petit tour d'horizon : le Parti Pirate n'est ni de droite ni de gauche, mais il est beaucoup de personnes, d'idées, de classes différentes. Mon idée est que le parti pirate pourrait être le parti de la démocratie directe, de la diversité culturelle et du progrès scientifique, mais quelle est votre idée ?
Une autre question polémique et assez intéressante : le PP est il anarchiste ? Révolutionnaire ?