fidèle à notre grande tradition de piratage de la presse en ligne, j'ai recueilli cet article fort bien pensé sur le site d'Arrêt sur images :
http://www.arretsurimages.net/contenu.php?id=2312
(Ce site nécessite un abonnement, donc le lien ci-dessus risque fort de ne vous servir à rien.)
Il contient de nombreux chiffres, que nous pourrions tous étudier avec profit -- à commencer par nos deux candidats

Et si la création était financée par le don ? C'est la question posée le 8 septembre par des artistes et acteurs du logiciel libre réunis à la mairie du 3e arrondissement de Paris. Plus qu'une question, une proposition : celle de créer une Société d'Acceptation et de Répartition des Dons (SARD). Imaginée par le chercheur Francis Muguet, cette structure permettrait de financer les oeuvres dont les auteurs ne sont pas dans le circuit classique du droit d'auteur et donc membres d'une Société de perception et de Répartition des droits d'auteur (comme la Sacem).
A quelques jours du vote sur la loi Hadopi, qui vise à instaurer une surveillance du réseau pour lutter contre le téléchargement illégal, l'idée de financer la création par le don peut être séduisante. Elle rappelle le concept de licence globale, qui supposerait que les internautes paient, chaque mois, une somme en sus de leur abonnement à internet pour pouvoir ensuite télécharger à loisir (concept qu'@si évoquait longuement ici). Mais le mécénat global diffère sur deux points, explique Richard Stallman, chantre du logiciel libre et impliqué dans cette initiative, sur ZDnet : "Avec le mécénat global, on ne parle pas de rémunération en fonction de la consommation." De plus, le système de dons laisserait l'artiste libre d'être à la fois dans le système classique de la Sacem tout en bénéficiant de la répartition des dons.
Qu'en serait-il de la redistribution des sommes gagnées ? Le mécénat global prévoit que les internautes qui donneraient à la SARD pourraient choisir de rétribuer un artiste en particulier, ou alors de participer à un pot commun, ensuite redistribué à tous les artistes. Ce système pourrait être mis en place sur les sites qui proposent de la musique, peu importe sous quelle forme (streaming, peer-tot-peer). Au-delà de l'internaute lambda, des institutions et des entreprises pourraient faire des dons, comme certaines en font à Wikipedia par exemple.
L'encyclopédie en ligne n'est-elle pas la preuve que le don peut fonctionner ? La fondation Wikimedia, qui gère l'encyclopédie, demande régulièrement de l'argent aux internautes pour financer ses serveurs et son administration. En janvier 2009, PCInpact relayait la satisfaction du fondateur de l'encyclopédie "Depuis le 1er juillet (2008, ndlr), plus de 125 000 d'entre vous ont donné plus de 4 millions de dollars. De plus, nous avons reçu des dons majeurs et le soutien de fondations pour un total de 2 millions de dollars", expliquait-il.
De quoi couvrir les frais de fonctionnement de Wikipedia jusqu'au 30 juin dernier... Rassurez-vous, la fondation a entre-temps reçu d'autres dons importants, de la part d'autres fondations notamment.
Notez que financer un artiste n'est pas comme financer Wikipedia : celle-ci ayant le statut de fondation, les dons ouvrent droit à des déductions fiscales, y compris en France. Mais le système semble aussi pouvoir fonctionner pour d'autres : le réseau de sites web Framasoft, dont l'objectif est de promouvoir le logiciel libre, a réussi à collecter 30 000 euros de dons pour continuer à faire vivre le site.
Ces expériences peuvent-elles s'appliquer à la musique en ligne ? Peu d'essais ont pour l'instant été menés dans ce sens, mais quelques artistes pionniers ont tenté d'emprunter cette voie.
In Rainbows - Radiohead Les plus célèbres : Radiohead. En 2007, le groupe anglais mettait en ligne sur son site son album InRainbows, laissant ensuite l'internaute libre de payer ce qu'il souhaitait, de rien à 99,99 livres. Selon une étude publiée par Comscore un mois après la mise en ligne, 62% des internautes avaient choisi de ne rien payer. Ceux qui ont payé ont en moyenne dépensé 6 dollars, ce qui ramène la moyenne du prix de vente d'un album à 2,26 dollars. Est-ce davantage que ce que le groupe aurait touché en passant par une maison de disques ? Difficile de le savoir, les transactions au sein des maisons de disques étant assez opaques. En tout cas, Radiohead a indiqué qu'ils ne renouvelleraient pas l'expérience.
Autre expérience, en novembre 2007 : celle du slammeur Saul Williams, qui a décidé de laisser le choix aux internautes, entre télécharger gratuitement son album "The Inevitable Rise And Liberation of Niggy Tardust" ou payer 5$ pour l'acquérir. Résultat : 154 449 personnes ont téléchargé l'album, parmi lesquelles 28 322 ont payé, soit 18,3%. En 2004, le précédent album de Saul Williams s'était vendu à 33 897 exemplaires.
Le producteur de Saul Williams n'est autre que Trent Reznor, le fondateur du groupe de rock industriel Nine Inch Nails, qui a lui-même décidé de se passer de sa maison de disques. En mars 2008, le groupe décide de mettre son album Ghosts I-IV à disposition sur son site sous plusieurs formes. D'une part, une version avec neuf chansons téléchargeables gratuitement, ainsi que plusieurs possibilités d'achat : pour 5 dollars, le téléchargement des 36 chansons de l'album, puis des versions CD allant de 10 dollars à 300 dollars pour l'édition de luxe. En outre, l'ensemble des 36 chansons est sous licence "Creative Commons". Ce que ça signifie ? Que les internautes sont libre de s'échanger les fichiers comme ils le souhaitent, même de les remixer s'ils veulent, tant qu'ils n'en font pas une utilisation commerciale. NIN- Ghosts I-IV
Or, surprise : l'album, salué par deux nominations aux Grammy Awards, a généré 1,6 million de dollars de chiffre d'affaires dès la première semaine. Mais surtout, Ghosts I-IV a été l’album MP3 le plus vendu en 2008 sur la plateforme de téléchargements de MP3 d’Amazon, où Trent Reznor l'avait mis en ligne pour la modeste somme de 38 dollars.
Difficile de tirer une conclusion de ces expériences. Le cas Nine Inch Nails ouvre des possibilités, mais a aussi la chance de pouvoir s'appuyer sur une importante communauté de fans. Un groupe moins connu parviendrait-il à mobiliser suffisamment pour gagner de l'argent ? Pas sûr qu'un système uniquement basé sur le don pour la rémunération de tous les artistes soulève le même enthousiasme.